Par Jean-Baptiste | Domaines d'expertise : économie et société

Publié le 21 juillet 2023 | Temps de lecture : 5 minutes

Les enjeux de la réforme des retraites pour les non-salariés

Validée par le Conseil constitutionnel en avril 2023, la loi sur la réforme des retraites devrait entrer en application en France dès le 1er septembre de la même année. L’objectif du projet est de garantir le maintien du système de retraite par répartition et préserver le modèle social français, avec pour principal levier la hausse de la durée de cotisations.

Parmi les entrepreneurs indépendants, qui est concerné par la réforme des retraites ? Les Travailleurs non-salariés (TNS) relèvent d'autres régimes de retraite que les salariés. Ils cotisent notamment pour certaines professions spécifiques au régime des professions libérales (CNAVPL), des avocats (CNBF), artisans, commerçants et industriels (SSI) ou des exploitants agricoles (MSA). Les micro-entrepreneurs relèvent du régime général. Tous les TNS scrutent ces changements. Explications.

Le calendrier du report de l’âge de départ à la retraite

La mise en application de la réforme des retraites est progressive. S’agissant des micro-entrepreneurs, les règles en vigueur sont similaires à celles du salariat, exception faite par rapport aux modalités d’acquisition des droits. À distinguer :

  • l’âge légal, à compter duquel vous serez autorisé à prendre votre retraite ;
  • l’âge du taux plein, vous permettant de partir à la retraite sans décote, c’est-à-dire sans coefficient de minoration appliqué sur le montant de votre pension.

L’âge légal de départ à la retraite

Aujourd’hui effectif à 62 ans et 7 mois en moyenne, l’âge légal de départ à la retraite passera à 63 ans et trois mois dès septembre 2023. Puis, il sera augmenté de trois mois par année de naissance jusqu’à atteindre 64 ans en 2030, à l’exception des personnes en situation d'invalidité ou d'inaptitude qui pourront toujours partir à 62 ans, même si elles n’ont pas cotisé le nombre de trimestres requis. L’âge de 55 ans est aussi maintenu pour les travailleurs porteurs de handicap.
Ainsi :

  • Les premiers concernés seraient les personnes nées entre le 1er juillet et le 1er décembre 1961, pour lesquelles l’âge de départ à la retraite sera fixé à 62 ans et 3 mois et qui devront cotiser 168 trimestres équivalent à 42 ans.
  • Les personnes nées à partir de 1968 devront attendre 64 ans. Les personnes nées à compter de 1973 devront cotiser 172 trimestres soit 43 ans (1) .

Combien faudra-t-il de trimestres pour une retraite à taux plein ?

Pour atteindre le taux plein de la pension retraite soit 50 % de la moyenne des 25 meilleures années, la durée de cotisations qui est de 167 trimestres actuellement sera progressivement augmentée d’un trimestre par an dès septembre 2023, pour atteindre 172 trimestres en 2027.

Micro-entrepreneurs, commerçants ou professions libérales auront droit à une retraite minimum à taux plein après 43 ans de cotisations, à partir de 2027. L’âge d’annulation de la décote est maintenu à 67 ans.

Notons que le gouvernement n’a pas précisé à ce jour les contours des modes de validation des trimestres de retraites pour les indépendants notamment en micro-entreprise. Pour l’heure, un auto-entrepreneur ne peut valider un trimestre que s’il a généré un certain chiffre d’affaires, basé sur un revenu annuel généré qui soit au minimum équivalent au SMIC, même s’il a cotisé par ailleurs (2) .

Ce qu’il faut retenir aussi de la réforme des retraites 2023

Plus d’équité entre travailleurs salariés et indépendants

Le gouvernement a prévu l’engagement d’études techniques et de concertations avec les représentants des différentes professions et leurs organismes de sécurité sociale. Cette démarche vise à réformer l’assiette des cotisations sociales des indépendants.

À la table des négociations : la simplification du calcul, l’amélioration de la capacité à générer des droits à la retraite et le renforcement des droits, notamment pour les cotisants aux revenus les plus modestes. Il est ainsi prévu que cette réforme du mode de calcul des cotisations vise à parvenir à une équité contributive entre les salariés et les indépendants.

Hausse de la retraite minimum pour les petits revenus

Une carrière complète sur une rémunération équivalente au SMIC devrait garantir une pension égale à 85 % du SMIC net, le montant actuel s’élevant à environ 75 % du SMIC. Les travailleurs indépendants ne pourront ainsi percevoir une pension minimum de 1200 euros brut, un montant indexé sur l’inflation, qu’après une carrière complète avec un revenu généré équivalent au SMIC. Cette réforme sera inscrite dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2024.

À lire aussi : La SSI pour les travailleurs indépendants : plus de simplicité et une meilleure protection

De nouveaux aménagements pour les carrières longues

La réforme des retraites envisage de renforcer les aménagements pour les carrières longues afin qu’aucun professionnel actif n’ait à travailler plus de 44 ans.

Ainsi, à partir de 2030, si vous avez commencé à travailler avant 16 ans, vous pourrez partir dès 58 ans. Ceux qui ont commencé entre 16 et 18 ans pourront prendre leur retraite à compter de 60 ans. Les actifs ayant débuté leur carrière entre 18 et 20 ans partiront en retraite anticipée dès 62 ans.

Ce système des carrières longues pourrait s’appliquer aux femmes dont la carrière a été interrompue par un congé parental d’éducation : elles pourront valider jusqu’à 4 trimestres supplémentaires. Enfin, les périodes de Travaux d'utilité collective (TUC) devraient également être comptabilisés dans le calcul des droits à la retraite.

La prise en compte de la pénibilité au travail

    Le gouvernement entend réformer le compte professionnel de prévention (C2P). Le nombre de critères de pénibilité passerait de 6 à 9. Aujourd’hui, les facteurs de risques sont :

  • le travail de nuit ;
  • le travail en équipes successives alternantes ;
  • le travail répétitif ;
  • les activités exercées dans des températures extrêmes ;
  • le bruit et en milieu hyperbare (lieu où la pression est supérieure à la pression atmosphérique).

    S’ajouteraient ainsi avec la réforme des retraites :

  • le port de charges lourdes ;
  • les postures pénibles ;
  • les vibrations mécaniques.

Une volonté de favoriser l’activité des séniors

Le gouvernement souhaite développer l’emploi chez les seniors, notamment les 60-64 ans dont seulement 33 % travaillent encore aujourd’hui. Les séniors sont pourtant nombreux à compléter leur retraite en tant qu’auto-entrepreneur, et 12 % d’entre eux en tant que micro-entrepreneur actif (3) . L’exécutif prévoit ainsi de créer un index senior.

Avec ce dispositif, les entreprises de plus de 300 salariés auront l’obligation de publier un index mentionnant le nombre de seniors au sein de leurs effectifs. Un index qui s'inspire de celui mis en vigueur pour mesurer l'égalité salariale entre les femmes et les hommes. Les critères de cet index seront variables et adaptés à chaque branche professionnelle.

Comment sécuriser la retraite de l’auto-entrepreneur ?

Deux solutions s’offrent aux actifs indépendants qui souhaitent s’assurer une meilleure pension de retraite : l’option cumul emploi-retraite qui devrait être revalorisée par la réforme et la voie de la retraite supplémentaire par capitalisation via le PER auquel vous avez droit.

Vers un assouplissement du cumul emploi-retraite

Le gouvernement souhaite assouplir le cumul emploi-retraite. Le principe ? Les retraités qui reprennent une activité professionnelle pourraient acquérir de nouveaux droits et percevoir une pension bonifiée, toucher des revenus professionnels tout en percevant une partie de ses pensions de retraite de base et complémentaire.

Cette nouvelle version du cumul emploi-retraite pourrait ouvrir des droits supplémentaires à la retraite pour les assurés qui remplissent les conditions du taux plein et qui ont liquidé toutes leurs pensions de retraite de base et complémentaire auxquelles ils peuvent prétendre (à l’exception de celles en cours de constitution dans le cadre de la reprise ou la poursuite d’activité). Notons qu’il ne sera pas possible de valider plus de 4 trimestres par an, même si vous cumulez une activité salariée et une activité en tant que micro-entrepreneur (4) .

Le PER : l’atout pour compléter sa retraite d’entrepreneur indépendant

Le Plan d’Épargne Retraite (PER) est un produit d'épargne à long terme, entièrement dédié à votre retraite. Son fonctionnement rappelle celui de l’assurance vie : vous cotisez à votre rythme et sans engagement durant votre parcours professionnel, puis vous récupérez votre épargne et ses plus-values à votre sortie, lors de votre départ en retraite.

Le PER offre une grande flexibilité au niveau de vos versements, pouvant être stoppés puis repris, et dont le montant peut être librement augmenté ou diminué. Les versements que vous effectuez sur votre PER pourront être déduits de votre imposition personnelle, ouvrant droit à une réduction d’impôts en fonction de vos cotisations.

À lire aussi : Projet de loi de finances 2023 : quels changements pour les micro-entrepreneurs ?

Les informations communiquées dans cet article sont à titre indicatif et non exhaustives. Il appartient au lecteur de se rapprocher de toute structure d’accompagnement ou tout conseil juridique, fiscal ou comptable pour disposer des informations complètes et précises.

(1) service-public.fr
(2) interieur.gouv.fr
(3) insee.fr
(4) bpifrance-creation.fr